La vie à la fin du XVIIIe siècle, notamment la pompe et l’apparat militaires, est le thème central de l’œuvre de David Fertig depuis une dizaine d’années. Toutefois il serait faux, bien que tentant, de ne voir en cet artiste qu’un peintre d’histoire soucieux de raviver l’ancienne dichotomie entre l’académisme et le romantisme. Fertig cherche plutôt à saisir un moment beaucoup plus actuel de l’histoire de la peinture : l’École de New York et ses antécédents et conséquences, notamment sur le plan de la tradition figurative.
La représentation de soldats et de bateaux dans l’œuvre de Fertig vient de son vif intérêt pour une période dont il est un expert autodidacte. Sa curiosité pour les affaires européennes et nord-américaines de la fin du XVIIIe siècle l’a incité à lire les sources primaires associées aux armées et aux marines de l’époque, tels les procès-verbaux des enquêtes de l’Amirauté britannique sur ses pertes de vaisseaux ou la correspondance privée des maréchaux. Aux récits romancés, il préfère les comptes rendus de première main et s’inspire des eaux-fortes, tableaux et sculptures de cette époque pour s’imbiber de l’apparence des personnages et des choses qu’il décrit. Harnachant sa passion pour un moment particulier de l’histoire, il s’intéresse aux préoccupations éternelles des peintres : la composition, la couleur, la ligne, la lumière et l’intégration des figures au paysage.
Les aspects les plus remarquables de son art participent sans doute de la surface et du traitement de la peinture. Plus jeune, au début des années 1960, Fertig a intégré la doctrine et l’approche prééminentes d’un autre mouvement marquant, l’Expressionnisme abstrait. Son pinceau et son style évoquent immédiatement l’abstraction de l’après-guerre, plus précisément celle des œuvres de John Graham et de Nicolas de Staël. Bien que ce mouvement soit généralement associé à l’abstraction, Fertig préfère y voir la tendance figurative qui l’anime. Du tourbillon des empâtements et des glacis de ses peintures émergent des illusions parfaitement convaincantes d’espaces et de figures qui rappellent indubitablement la touche de son mentor, Robert Kulicke. De plus, Fertig n’écarte pas l’art de l’illustration (enfant, il adorait L’Île au trésor) et, comme le donnent à penser les titres de ses œuvres, il souhaite vraiment raconter ou, du moins, suggérer une histoire. Il représente les choses comme il imagine qu’elles se sont vraiment passées. Aussi ne devrait-il pas être séparé de son ami Robert Andrew Parker ou d’autres artistes plus célèbres, tel R. B. Kitaj ou Jim Dine, qui tous privilégient la figure, laissant la nature influencer leur peinture et offrant à leur public un récit, tout en restant fidèles aux réussites stylistiques de leurs prédécesseurs immédiats.
David Fertig est né 1946 à Philadelphie, en Pennsylvanie. Il vit et travaille à Pemberton, un village du New Jersey.
-Jay Grimm
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